long quiet river

Où étais-tu le soir où Jenna Welsten a été tuée ? : Je venais tout juste d'arriver à Honeydale, ça faisait peut-être une semaine que j'étais là. Je sirotais un verre en terrasse à ce moment-là et je n'ai appris le drame que le lendemain grâce à des voisins. Je ne connaissais pas Jenna, mais sa mort m'a fait froid dans le dos. Elle était si jeune... J'avoue que je n'ai pas bien dormi les jours suivants...
Parle nous de ta famille ? : Ma famille c'est mon bonheur, mon soleil. J'ai la chance d'être proche d'eux et de m'entendre avec tout le monde. Aussi loin que je me rappelle les disputes étaient quasi-inexistantes, nous ne roulions pas sur l'or mais nous avons appris à apprécier les plaisirs simples. Mon père nous a donné le goût de la culture, la peinture, la musique et la littérature quand ma mère nous apprenait à nous servir de nous main surtout pour jardiner ou cultiver. J'appelle mes parents au moins une fois pas semaine et je dépasse toujours mon forfait, mon opérateur doit m’appeler la poule aux œufs d'or. Pareil pour mon frère ou ma sœur, pas un jour sans qu'on s'envoie un message.
De quoi as-tu peur ? : J'ai peur de beaucoup trop de choses. C'est moi l’aîné de la fratrie et pourtant c'était toujours mon frère ou ma sœur qui me rassurait. Voici donc une liste non exhaustive de mes peurs : l'orage, les araignées ou les insectes en général, l'abandon, le sang, les clowns...


- Alors ça y est hein ? Le grand départ ?

La voix de Fabien, mon frère, semble calme, même un peu rieuse mais moi qui le connais bien j'y descelle l'émotion. Je pose ma grande patte sur son épaule, comme je faisais quand il était gosse alors qu'aujourd'hui il a 24 ans et qu'il me dépasse de deux têtes. Je lui souris et lui réponds sur le même ton amusé, essayant sans succès de masquer aussi bien que lui mon trouble.

- Ouais, le début de l'aventure ! Tu verras, quand je reviendrai tu m'reconnaîtras plus, j'aurai pris 200 kg. Paraît que même leurs légumes sont plus gras que nos vaches et...

J'ai pas l'temps de finir ma vanne, je vois un crinière brune et bouclée foncer vers moi et me sauter au cou dans un cri strident.

- TIIIIIIIIM !

J'ai du mal à la rattraper, manque de me casser la gueule avant d'arriver finalement à la porter contre moi, grimaçant.

- Putain Claire t'es lourde ! Qu'est-ce qu'ils te donnent à bouffer au lycée ?

Faut dire que, du haut de ses 18 ans, le bébé de la famille fait pas loin de ma taille. Ses larmes mouillent mon cou alors qu'elle se marre.

- Emmène-moi dans tes valises ! Steuplaît ! Je serai cool et je ferai pas de bruit...

J'embrasse son front en la posant par terre. Par dessus son épaule j'ai vu mes parents dans l'encadrement de la porte. Papa porte mes valises que je m'empresse de lui prendre alors que maman vient me serrer contre elle, digne.

- Laisse-faire papa, c'est plus de ton âge de faire le bagagiste.

Son grand sourire caché à moitié par sa moustache blanche, il pose sa main caleuse sur mon épaule, comme je l'ai fait à Fabien avant que Claire m'explose le dos. Son geste vaut plus que de longs discours. Je me tourne vers ma mère et lui remets bien son châle sur les épaules, souriant.

- Je vous appelle une fois là-bas. Une fois à Honeydale.